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Votre vote compte, mais est-ce important ?

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Oct 04, 2016

Comme le dit la boutade de William Vaughan, "un citoyen américain traversera l'océan pour se battre pour la démocratie, mais ne traversera pas la rue pour voter lors d'une élection nationale".

Cette boutade, qui donne à réfléchir, expose l'absurdité du problème de la baisse de la participation électorale. Les lecteurs réagiront probablement à cette phrase de manière instinctive ou systématique. Instinctivement, certains accuseront les électeurs d'être stupides et paresseux. D'autres réagiront à cette allégation avec plus de scepticisme. Cette dichotomie soulève des questions importantes dans le discours public. La folie, la léthargie et l'irrationalité des électeurs sont-elles vraiment à blâmer ? Ou y a-t-il un autre coupable ?

Dans cet article, les arguments proposés par la théorie des choix publics sont utilisés pour expliquer pourquoi les électeurs ne sont pas simplement apathiques à l'égard du processus électoral. Pour commencer, des comparaisons sont établies entre le comportement des électeurs et celui des consommateurs afin de démontrer que l'apathie n'est pas la seule source du problème.

Électeurs et consommateurs

Si les consommateurs sont mal informés et incapables de différencier les bons des mauvais produits, la concurrence sur le marché n'entraînera pas d'amélioration de la qualité des produits. Les producteurs ne seront pas incités à améliorer la qualité des produits simplement parce que les clients ne seront pas disposés à payer des prix plus élevés. Il en va de même pour les hommes politiques et les politiques. La concurrence entre les candidats politiques n'améliorera pas la qualité des politiques si les électeurs ne sont pas informés. Dans les deux cas, notre ignorance encourage la négligence des fournisseurs de politiques et de produits (c'est-à-dire les politiciens et les spécialistes du marketing).

Cependant, il serait fallacieux de prétendre que l'intérêt personnel n'est pas partagé par le public. Tout le monde a un "agenda" d'intérêts particuliers ! Le public a intérêt à obtenir les "meilleures affaires" sur le marché et la "meilleure représentation" en politique. De leur côté, les hommes politiques et les entreprises ont intérêt à faire des bénéfices et à gagner du pouvoir. La vérité, encore plus accablante, est que les incitations du système démocratique sont conçues pour récompenser l'intérêt personnel ! Il est important de noter qu'il existe une distinction essentielle dans la manière dont l'intérêt personnel fonctionne avec les électeurs et les consommateurs. Pour le comprendre, il suffit d'appliquer la logique des prix relatifs.

A.

Sur le marché, vous choisissez entre X et Y. Si vous choisissez X, vous obtiendrez X.

B.

Dans l'urne, si vous choisissez X plutôt que Y, vous obtiendrez ou non X.

Si la majorité choisit X, vous obtenez X. Si la majorité choisit Y, vous obtenez Y

En d'autres termes, l'inconséquence individuelle existe pour les électeurs, mais pas pour les consommateurs. Logiquement, on peut soutenir que les électeurs sont plus vulnérables que les consommateurs en acceptant ces prémisses. L'inconséquence individuelle est problématique parce qu'elle a un impact négatif sur la motivation. Un mécanisme important pour expliquer cela est la motivation instrumentale (c'est-à-dire le bénéfice que l'on retire de l'utilisation fonctionnelle d'un moyen, d'un agent ou d'un outil) et la motivation procédurale (c'est-à-dire le bénéfice qui dépend de ses propres actions). Par exemple, un électeur peut voter simplement parce que la démocratie est un instrument ou un outil qui lui permet d'exprimer ses préférences politiques. Par ailleurs, certains électeurs peuvent voter par devoir civique, pour participer au "processus démocratique", pour exprimer leur allégeance ou leur loyauté envers un parti politique ou pour juger de la supériorité morale d'un candidat. Quelle que soit la motivation des électeurs, le rapport entre les avantages instrumentaux et procéduraux est inégal lorsque l'on compare les électeurs aux consommateurs.

A.

Sur le marché, les avantages instrumentaux et intrinsèques s'échangent dans un rapport de 1 à 1. Un dollar d'avantage instrumental vaut un dollar d'avantage intrinsèque.

B.

Dans les urnes, la valeur d'un dollar de bénéfice intrinsèque reste un dollar, la valeur d'un dollar de bénéfice instrumental se réduit à un dollar multiplié par la probabilité que son vote soit décisif (c'est-à-dire que son vote décide du résultat électoral parce qu'il y a égalité exacte entre les autres votants).

La probabilité que votre vote soit décisif lors d'une élection démocratique nationale est proche de 0. Les estimations les plus optimistes suggèrent qu'il y a une chance sur 10 000 que votre vote soit décisif. Ainsi, l'utilité relative des avantages procéduraux pour les électeurs est de 1:10 000, ce qui est nettement inférieur aux chances des consommateurs.

Voici une petite expérience de pensée. Imaginez que j'ai caché une grosse somme d'argent dans un endroit secret. Dans lequel des deux cas suivants vous sentez-vous plus motivé pour la trouver ?

A.

J'ai caché 1 million de dollars quelque part. L'indice de sa localisation se trouve dans ce livre.

B.

J'ai caché 100 millions de dollars quelque part. L'indice de sa localisation se trouve dans une page aléatoire d'un livre parmi 54 millions d'autres livres à la Bibliothèque et aux Archives du Canada.

L'attitude politique de nombreux électeurs coïncide avec ce dernier cas. La récompense attendue ne dépasse pas les coûts, et les électeurs pensent donc que le jeu n'en vaut pas la chandelle (c'est-à-dire lire des milliards de pages à la recherche d'un indice). Souvent, ce n'est pas que les électeurs s'en désintéressent. Les électeurs comprennent que leur vote n'a aucune signification individuelle. Les électeurs sont ignorants parce que l'acquisition de connaissances politiques ne vaut pas la peine d'y consacrer du temps et des efforts, car ils ne s'attendent pas à un changement proportionnel dans la politique.

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Scepticisme et cynisme

Le cynisme peut sembler une réaction logique à la vague constante de mauvaises nouvelles. Nous lisons des titres en caractères gras et majuscules qui parlent de scandales, de conspirations et de problèmes insolubles. Nous entendons à la télévision des extraits sonores qui fragmentent les téléspectateurs et attaquent les réseaux adverses. Nous suivons des tweets et des statuts Facebook qui simplifient à l'extrême des questions complexes. Dans tout ce bruit et cette fureur, il est tentant d'adopter une approche cynique de la politique.

Il est séduisant de répondre par une méfiance et une suspicion constantes. On peut facilement devenir un critique qui jette des pierres depuis la ligne de touche ou qui se désengage complètement du débat public. Cette position ne demande que très peu de créativité et d'efforts. Je vous invite à adopter une autre approche ! Il faut reconnaître que tant que le gouvernement, les médias et les entreprises seront dirigés par des êtres humains imparfaits, nous serons déçus et frustrés. Les électeurs et les consommateurs ne sont pas des victimes ! Nous avons les mêmes imperfections et insuffisances que nos dirigeants qui sont mus par leur intérêt personnel, leur ego et leur cupidité.

En résumé, comme l'a dit George Jean Nathan, "les mauvais élus le sont par les bons citoyens qui ne votent pas". Il semble qu'un électeur qui relativise le pouvoir de son seul vote soit réellement informé et donc plus apte à voter.

About the Author

Arash Sharma portrait

Arash Sharma

Concordia University · Behavioral Economics

Arash est étudiant-chercheur au Centre for Multidisciplinary Behavioural Business Research de l'Université Concordia. Il s'intéresse à l'étude des mécanismes cognitifs et neurobiologiques de la prise de décision.

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